La douance est-elle vraiment un frein à des relations épanouissantes ?

Dans les médias, au travail ou à l’école, nous avons sûrement tous entendu parler des « surdoués ». Bien souvent, l’idée du HPI est associée à un lot de problématiques presque inéluctables, notamment dans les dynamiques relationnelles. L’image d’individus solitaires, en décalage et dans l’incompréhension des autres leur colle à la peau. Les difficultés relationnelles des personnes à haut potentiel intellectuel sont-elles un mythe ? Loin des préjugés, plongeons dans ce questionnement aussi passionnant que déroutant.

Qu’est-ce qu’une personne HPI ?

Une définition claire, à priori

Le haut potentiel intellectuel correspond à un score de QI (quotient intellectuel) obtenu lors d’un test qui évalue quelques aptitudes cognitives (WISC-V jusqu’à 16 ans, WAIS pour les adultes) : 

  • indice de compréhension verbale ; 
  • indice visuospatial ; 
  • indice de raisonnement fluide ;
  • indice de mémoire de travail ;
  • indice de vitesse de traitement.

Lorsque le résultat total du QI est égal ou supérieur à 130, une personne est considérée à haut potentiel intellectuel. Cela signifie que les compétences dans les domaines évalués sont supérieures aux gens du même âge, la moyenne de QI étant de 100. Les « zèbres »représenteraient 2,28 % de la population. 

Un concept flou, à postériori

Étonnamment, le haut potentiel intellectuel n’a pas de réelle existence scientifique. C’est pourquoi nous devons aborder ce sujet avec prudence. Qu’est-ce que l’intelligence ? Comment évaluer l’intelligence d’un individu en ne mesurant qu’une infime partie de ses compétences cognitives ? D’ailleurs, le QI est-il un indice fiable d’intelligence ? Ces questions scientifiques, voire philosophiques, sont bien trop nombreuses et complexes pour y répondre clairement. 

Aujourd’hui, il n’existe aucun consensus scientifique autour du HPI. Certains pensent que les surdoués existent, d’autres estiment que la notion est trop floue pour l’établir. Il y a peu de chances pour que les mystères du cerveau humain soient percés un jour, et la précocité en fait partie.

Alors pourquoi faire des tests de QI ?

Généralement, les tests de QI sont effectués dans le cadre d’une scolarité laborieuse : ennui en classe, difficulté de contact avec les autres, déconcentration, échec scolaire, etc. Certains adultes testent leur quotient intellectuel lorsqu’ils rencontrent des difficultés assez communes aux surdoués, aussi appelés « zèbres ». Ces évaluations sont réalisées par des psychologues spécialisés qui peuvent proposer des pistes, afin d’aider les élèves et les adultes en souffrance. 

Personne HPI et difficultés sociales : une femme assise devant un livre ouvert, qui réfléchit et s'ennuie
Un étudiant à haut potentiel intellectuel peut ressentir de l’ennui pendant ses études.

Les compétences mesurées dans le test sont très représentatives de celles attendues en milieu scolaire. C’est donc à l’école que le test de QI se révèle le plus utile. L’intérêt n’est pas le résultat, mais bien de proposer les solutions les plus adaptées à l’enfant : aménagement d’emploi du temps, activités périscolaires, adaptation de certains exercices, et bien d’autres. Toutefois, le risque est de focaliser toute l’attention sur le score et d’occulter les sources du problème, qui peuvent être nombreuses. 

➡️ Pour en savoir plus : Enfant atypique : détecter, comprendre, valoriser

Quelles caractéristiques retrouve-t-on chez les zèbres ? 

Des rayures qui se ressemblent 

Malgré l’absence d’un lien irréfutable entre un QI élevé et les comportements des personnes douées, on retrouve certaines particularités récurrentes, entre autres : 

  • le perfectionnisme ;
  • une grande curiosité ;
  • un fort besoin de sens ;
  • une tendance à l’égocentrisme ;
  • un rapport intense au monde et aux autres ;
  • une sensation de décalage et d’isolement ;
  • de nombreux questionnements existentiels.

Une fois de plus, les experts sont divisés à ce sujet. Il est impossible d’affirmer que tous les surdoués se ressentent ainsi. Néanmoins, de nombreux professionnels en contact régulier avec des zèbres ont rapporté ces traits familiers aux HPI.

Haut potentiel intellectuel et hypersensibilité 

Dans l’imaginaire collectif, HPI irait de pair avec une sensibilité exacerbée. Les surdoués auraient du mal à gérer leurs émotions et à les communiquer aux autres. Pourtant, le haut potentiel intellectuel favoriserait plutôt une certaine intelligence émotionnelle et une bonne adaptation socio-émotionnelle. Alors, comment se fait-il que cette habileté ne produise pas l’effet attendu ?  

Plusieurs hypothèses sont avancées, bien qu’aucune d’entre elles ne mette tout le monde d’accord : 

  • la difficulté des HPI à sortir de leur propre prisme de pensée ;
  • le faux-self appris très jeune pour simplifier le contact avec ses pairs ;
  • la remise en question quasi constante chez les zèbres qui entraîne un manque de repères, de stabilité et de confiance en soi.

Quelle évolution dans le temps ? 

Plus la douance est révélée tôt, plus il sera facile de faire face aux difficultés fréquentes chez les HPI. Certains auront besoin d’un accompagnement particulier, d’autres pas. De la même façon que certains zèbres souffrent de leurs particularités, d’autres sont des surdoués qui s’ignorent toute leur vie.

La précocité ne disparaît ni à l’adolescence ni à l’âge adulte. La plupart sauront mettre leurs compétences à profit de leur épanouissement dans les différentes sphères de la vie. N’oublions pas que le haut potentiel n’est pas un désavantage, lorsqu’on apprend à faire avec. 

➡️ À lire aussi : Douance, le haut potentiel à l’âge adulte

Comment gérer les difficultés relationnelles d’un haut potentiel intellectuel ?

L’amalgame autour du HPI

Le quotient intellectuel a bon dos pour justifier les embûches dans la vie d’un zèbre. Seulement, la source du problème ne peut pas être uniquement liée à ce fonctionnement différent. De nombreuses pistes sont à explorer comme le milieu familial, l’éducation, la personnalité de l’enfant ou sa vision du monde extérieur. 

Le QI est très rarement la cause directe du mal-être des surdoués. C’est pourtant ce que la romantisation du quotient intellectuel voudrait nous faire croire, alors qu’un fort QI représenterait au contraire des capacités avantageuses pour soi et dans le lien avec les autres. 

Aider les zèbres en souffrance

Concrètement, quel lien clair et irréfutable peut-on établir entre le HPI et les difficultés relationnelles ? Aucun, à l’heure actuelle. Si des problématiques de sociabilisation apparaissent, il convient d’aborder les autres causes possibles en priorité avec un professionnel spécialisé tel que les croyances limitantes, la peur de l’extérieur, un sentiment de différence, de rejet ou de solitude.

Difficultés relationnelles des personnes HPI : une femme assise dans un café qui se tient le front. Elle est seule et triste.
Solitude, rejet, difficulté à se faire des amis… En cas de difficultés relationnelles, la douance est une des pistes à explorer.

L’aide des thérapeutes peut se révéler indispensable lorsque les difficultés sociales deviennent trop importantes. Voici quelques pistes de réflexions intéressantes de travail sur soi pour un haut potentiel intellectuel : 

  • comprendre et apaiser l’idéal de perfection ;
  • travailler la confiance en soi et construire des repères sécurisants ;
  • aborder les questionnements existentiels qui peuvent créer des angoisses ;
  • s’intéresser au fonctionnement des autres, aux points communs et aux différences ;
  • revoir le processus d’hyper intellectualisation qui met de côté les ressentis émotionnels.

Comprendre son fonctionnement différent est nécessaire pour un zèbre en souffrance, notamment en milieu scolaire, mais cela ne doit surtout pas le définir. Placer le haut potentiel intellectuel comme la cause principale des difficultés relationnelles, c’est passer à côté du vrai problème.

Vous êtes une personne HPI et vous rencontrez des freins dans vos interactions sociales. Comment réussissez-vous à progresser dans vos relations aux autres ? Partagez votre expérience en commentaire.

Eden Alves-Gabiron

Références : 

Ramus, F (2012). L’intelligence humaine, dans tous ses états. Préface.

🔗 http://www.lscp.net/persons/ramus/docs/C&P12intelligence.pdf

Kostogianni, N., & Andronikof, A. (2009). Estime de soi, égocentrisme et adaptation socio-émotionnelle des enfants et adolescents surdoués. L’Encéphale.

🔗 https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/19853713/

Boisselier, N., Soubelet, A. (2021). La sociabilité et l’attrait pour la solitude des adultes à haut potentiel intellectuel (HPI). Psychologie française, 66 (4). 

🔗 https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0033298421000169

Liratni, M., Pry, R. (2011). Enfants à haut potentiel intellectuel : psychopathologie, socialisation et comportements adaptatifs. Neuropsychiatrie de l’Enfance et de l’Adolescence, 59.

🔗 https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0222961710001923

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